L’AMDH est persécutée par l’Etat de
non-droit
Depuis 1956 et surtout depuis l’intronisation du tyran Hassan II en
1961, l’Histoire du Maroc est essentiellement caractérisée par l’inséparable
duo : oppression/résistance. Un régime sanguinaire d’un côté, un peuple en
lutte de l’autre. Entouré des officiers
formés dans les écoles des armées coloniales française et espagnole, forgés
dans les luttes impérialistes contre les peuples indochinois, peuples dirigés par
les forces communistes révolutionnaires, entouré des bourgeois compradores, des
grands propriétaires terriens et autres colabo du colonialisme, épaulé par les
états français et américains, financé par les monarchies du golf, Hassan II avait
fait du Maroc une véritable citadelle carcérale, un archipel parsemé de bagnes
(tazmart, derb Moulay Cherif, Maison centrale de Kénitra, Klaât Mgouna, Agdés, centre de Courbès…). Des milliers d’innocents,
de combattants de liberté ont payé de leur vie la facture de la résistance à la
tyrannie du « commandeur des croyants ». Du sang, beaucoup de sang, a
coulé.
Le mouvement ittihadi a sacrifié des
centaines, des milliers de ses meilleurs militants pour la liberté, pour la
libération et ce , depuis 1958/59. Pour la juste cause, la cause des déshérités,
la cause des travailleurs, la cause du peuple marocain, le mouvement marxiste
léniniste a contribué au sacrifice depuis sa naissance en 1970.
Sous la direction des femmes, le
mouvement des familles des prisonniers politiques a vu le jour au lendemain des
arrestations des marxistes léninistes en 1972. Les épouses telles Jocyline,
Khadija, Latifa, Leila…les sœurs telles Badia, Rabea…les mères telles celles
d’Assidon, de Khotbi , d’Amine… ont pris le flambeau de la marche sur le
sentier de la VERITE, la marche sur chemin de la SOLIDARITÉ. Faire connaître la
vérité, dévoiler le hideux visage du régime sanguinaire. Porter le soutien aux
prisonniers. Exprimer la solidarité des familles avec les leurs.
Les familles des prisonniers
marxistes léninistes (procès de janvier 1977) sont venues renforcer ce
mouvement et ce, depuis les premières arrestations de novembre 1974.
Après l’avortement de la première tentative de
créer une association des droits humains au Maroc au début de 1972 sous la
direction d’Amine Abdelhamid (ILAL AMAM), d’Aït Kaddour (UNFP)…, des démocrates
ittihadis, à leurs têtes, Aberrahman Ben Ameur, El Hihi, Ali Oumlil et de dizaines d’autres…fondent avec
les familles des prisonniers politiques et d’autres démocrates indépendants
l’AMDH en juin 1979.
Depuis cette date l’AMDH n’a pas cessé
de dénoncer la répression et l’étouffement politique qui règnent au Maroc. Avec
le temps, en plus de la défense des droits politiques, la grande AMDH a étendu
avec raison ses activités à la défense des droits économiques, sociaux et
culturels des citoyens.
L’AMDH a mis la vraie nature du régime à nu, aussi bien avant 1999,
qu’après cette date. La continuité étant de rigueur.
Symbole de la défense des droits humains, la
colombe AMDH est ciblée/traquée comme « gibier » par les prédicateurs
de tous poils.
A la veille de l’année 2015, empêtré dans ses échecs diplomatiques,
empêtré dans ses constrictions, pataugeant dans les sables mouvants des
scandales à répétition et à tous les niveaux… l’Etat marocain tente de
supporter la responsabilité de ses malheurs à l’AMDH et à toutes les forces de
résistance. L’échec de la tentative est inéluctable. Ce n’est pas la première
fois que le régime essaie de liquider l’AMDH.
Rappelons-nous la tentative de 1983
Au
lendemain de ma première sortie de prison en 1982, je rejoignis immédiatement
les rangs de l’AMDH. Au cours d’une assemblée générale j’osai poser le problème
du bagne de Tazmamart. Ce qui m’a causé des ennuis par la suite. La police ne
pouvait pas admettre tel comportement surtout que le tyran Hassan II avait prétendu,
que les bagnes de Tzamamart, d'Agdès, Klaât Mgouna , n’existaient que dans
l’imagination de certains journalistes étranger.
Pour domestiquer l’AMDH, l’Etat avait misé alors sur l’USFP (tendance
bureau politique), sur le PPS et sur d’autres éléments louches. Le 2ème
congrès de l’AMDH devrait avoir lieu en été 1983. L’Etat profita des luttes
intestinales que connaissais alors l’USFP, lutte entre le courant de droite
sous la houlette du bureau politique d’un côté et le courant de gauche ayant la
majorité au sein de la commission administrative (devenu PADS par la suite).
Les arrestations arbitraires de 8 mai 1983 dont étaient victimes des dizaines
de camarades de Ben Ameur et d’El Hihi, avaient
porté un coup dur à l’AMDH.
A la veille du congrès (juillet 1983), la composition des congressistes
se présentait ainsi (classement selon l’importance de l’effectif) :
futur PADS, USFP (droite), « proches du mouvement marxiste
léniniste », PPS, « indépendants ». Le congrès devrait avoir lieu au centre « La
Belle Vue» à Agdal (Rabat). Aucun courant n’avait la majorité. Les enjeux
étaient vitaux pour la survie de l’AMDH. L’Etat avait misé sur l’alliance
USP-PPS et autres « indépendants » et sur la « division »
des proches du mouvement marxiste léniniste et ce, pour mettre en minorité les
futurs padsistes.
Les congressistes « ML » ont vécu une nuit difficile à un jour
de l’ouverture du congrès. Des éléments,
très minoritaires mais virulents, avaient tout fait pour nous pousser à nous
allier avec l’USFP-PPS et consorts. J’étais scandalisé. On était infiltré. Au levé de soleil, la décision de s’allier
avec les camarades de Ben Ameur fut prise à une écrasante majorité. Ouf ! J’avais
vraiment chaud.
Au jour « j », tout le monde était au centre « La Belle
Vue ». Vers 22h, et certainement après le comptage des congressistes selon
la « couleur » par des services occultes, le directeur du centre nous
fit part de la décision du ministère de l’intérieur d’interdire le congrès.
Le centre fut entouré des forces de répression. Les congressistes furent
chassés du centre où devrait se dérouler normalement le congrès.
Incapable de la domestiquer, l’Etat avait choisi d’empêcher l’AMDH de «fonctionner »
et ce, pendant quelques années. Une
interdiction de fait.
Il fallait
attendre le retour du Ben Ameur, de Ben Abdeslam, l’arrivée d’Amine, de Khadija
Ryadi et de centaines d’autres militant-es pour que l’AMDH relève de nouveau la
tête, et s’anime de plus de vitalité.
QUE REPROCHE-T-ON A L’AMDH ?
A la veille de 2015, l’Etat cherche à «assassiner »
lâchement l’AMDH. L’assassinat de tout ce qui est vivant/opposant fait partie
des pratiques du régime marocain et ce, depuis des siècles.
L’Etat marocain reproche à l’AMDH de ne pas cautionner les positions
officielles. L’Etat (de non droit) exige de l’AMDH de se renier. Le makhzen
veut que l’AMDH troque son essence, sa raison d’être contre le « gilet
anti-balles » du régime, contre les largesses des potentats.
L’AMDH dérange plus d’un. L’AMDH dérange par son rayonnement national et
international, par la fiabilité de ses données, par l’honnêteté et le
dévouement des ses milliers de millitant-es, par sa solidarité avec les
victimes des violations, par sa dénonciation des abus. Si la «nouvelle ère »
est toujours vierge comme le prétendent les « marieuses » telles celles
du CNDH et autres courtisans de la Cour. A quoi sert de nier, épée à la main, l’évidence
quand la preuve, pardon les preuves, du contraire sont là. La dizaine des
martyrs du Mouvement du 20 février est là pour témoigner. Des martyrs de l’UNEM,
des frachas…sont là aussi pour témoigner. Des centaines de prisonniers
politiques, des prisonniers des mouvements sociaux végètent dans les geôles du
régime. Ces victimes de l’arbitraire sont là pour témoigner des crimes et violations
commis depuis 1999.
C’est difficile de tromper les prétendants et
autres observateurs.
Je tiens à dédier cet écrit à la
prisonnière de l’AMDH, Wafae Charaf, condamnée arbitrairement à deux ans de
prison ferme pour avoir exprimé sa solidarité avec des ouvrières, ouvrières
victimes d’abus, à tous les prisonniers de l’UNEM, des mouvements sociaux, du
mouvement de 20 février, aux prisonniers
« islamistes » qui n’ont pas commis de crimes contre des innocents.
Ces derniers sont des centaines à être victimes de procès iniques comme l’ont
souligné (à juste titre) des organisations nationales et internationales de la
défense des droits humains.
Ali Fkir, le 28 décembre 2014-12-28
NB : Je ne me suis jamais
présenté aux élections pour faire partie d’un bureau de section, ni participé à
un congrès de l’AMDH, à l’exception de la participation au congrès interdit en 1983. En 1983, c’était une question de «vie ou de mort».
Aujourd’hui, je suis heureux de
voir que «l’armée» de l’AMDH est constituée essentiellement de milliers de femmes et de
jeunes. C’est la force de cette adorable ONG. C’est la fierté des démocrates
marocain-es.
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