mardi 29 mai 2018

Une pensée à cette mère et ce père

UNE PENSÉE A CETTE MÈRE ET A CE PÈRE QUI N'ONT JAMAIS ENTRAVE LA MARCHE DE LEUR FILS COMMUNISTE...
REPOSEZ EN PAIX ZAHRA ABBOU ET HMAD OUMOUH. 
JE VOUS PORTE DANS MON COEUR.

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Extraits du livre "le petit berger qui devint communiste"

1 -La division de travail au sein
de la famille du petit berger,
   La ligne de démarcation entre les prérogatives des membres (sauf pour les moins de 4 ans) de la famille était claire.
   La mère doit :
-      Se réveiller à l’aube moudre le blé, pétrir de la pâte, cuire le pain, préparer le petit-déjeuner et traire les chèvres et les brebis
-      Aller chercher du bois au cours de la journée
-      Préparer éventuellement le déjeuner si le père est là. En son absence, ce qui était fréquent, les autres membres de la famille attendent le dîner
-      « Profiter » des temps morts pour continuer la confection d’un tapis. Il n’était pas question d’acheter des tapis. C’était l’œuvre de la femme. Elle s’occupait de tout le processus de production : préparation de la laine, filature et puis tissage. Aujourd’hui encore, le petit berger est en possession d’un tapis (hanbal) qu’a confectionné la défunte au début des années cinquante
-       Préparer le souper
-      Accueillir après le coucher de soleil le petit troupeau. Compter et recompter le nombre de têtes.
-      Sortir souvent la nuit voir les ovins/caprins, secouer les chiens…car les loups rodaient toujours dans les parages.

2 -Le père avait noué des contacts avec des nationalistes. Il a pu retrouver la famille militante de son héro Moha Azougagh installée à khénifra, des contacts à Fès grâce à son ami Belhabib, le camionneur…, qui assurait le transport des marchandises de Fès à Beni Tadjit…Il fera partie du premier groupe de nationalistes de la région qui comprenait essentiellement des Mineurs et des petits commerçants. Les petits commerçants avaient joué un rôle déterminent dans la propagande nationaliste, du fait de leurs déplacements fréquents à Fès. Le père du petit berger était comme un professionnel du mouvement, car il n’avait pas d’occupation professionnelle réelle. Les enfants et surtout l’épouse s’occupait de tout. Toujours en déplacement entre Beni Tadjit, Khénifra et Fès

3-Un jour de l’année 1953 (ou 1954), à une quinzaine de kilomètres du village minier, arriva l’oncle maternel Ali (un autre Ali), le feu au cul comme on dit, se dirigea vers sa sœur lui dit quelque chose. Ce fut l’alerte. Les trois (ou quatre familles) habitant dans le coin, tinrent une « assemblée ». Pas de différence entre les hommes et les femmes. La décision fut prise à l’unanimité en quelques minutes. Il fallait s’évaporer dans la nature. Le père du petit berger, ainsi que plusieurs militants nationalistes venaient d’être arrêtés au village minier par les « roumis/n’sara ». Le campement pourrait être investi à n’importe quel moment par les forces coloniales. S’évaporer dans la nature ? Les familles concernées sont bien rôdées pour cela. Les leçons de l’épopée de 1907 à 1934 n’avaient pas été oubliées. En quelques minutes, tout fut chargé sur les ânes, sur les mules, et sur un dromadaire (une famille en avait un). La marche dura l’après-midi et une partie de la nuit. Les « fuyards » s’installèrent très loin  du village  au pied d’une montagne, dans un petit ravin, près des petites grottes pour éviter les frappes aériennes. Le coin était inaccessible aux camions militaires…

4-En automne de l’année 1955, le père s’acheta une radio. La batterie était plus lourde que la radio, elle-même très volumineuse. La première radio dans le douar Taghannamit. Tout le douar était là. Il fallait installer sur le toit l’antenne. Ce fut toute une cérémonie. Les gens avaient l’air grave, étaient sereins. C’était quelque chose d’extraordinaire.

  5-A Kénitra, (la ville se trouve à une quinzaine de km de la mer), le jeune emmena sa mère voir de ses yeux la réalité. La plage de Mehdia est splendide, en même temps dangereuse, (comme les belles femmes et cela selon la théorie au masculin). Le jeune installa sa mère à la terrasse d’un café donnant directement sur la mer. Elle n’avait jamais vu auparavant cette étendue (à l’infini) d’eau. Il n’y avait pas de tombeaux de saints. Au pied de la terrasse, des américaines en maillots, allongées sur le dos, sur le ventre… Sur la terrasse du café des couples américains s’embrassaient, de jolies fillettes marocaines passaient et repassaient à la recherche de clients, tout en mettant en relief ce qu’elles avaient de plus attirant (hanches, poitrine…). N’oublions pas que Kénitra était à ce moment la capitale des américains au Maroc. Il y avait 3 grandes bases américains : celles de Kénitra, celle de Sidi Slimane et celle de Sidi Yahaya à une quarantaine de km de la ville de Kénitra. Les jeunes soussis du « village » (quartier moderne de la ville) parlaient l’anglais avant l’arabe et le français. En cas d’accidents ou de rixes…les deux polices étaient là. La police américaine avait toujours le dernier mot.
   La base de Kénitra était une véritable ville. Pour y accéder, il fallait avoir un laissez-passer. Le jeune l’avait. Deux jeunes de Beni-tadjit y étaient mariées. Une à un aviateur  (du bled aussi), l’autre, une proche parente mariée à un sous-officier de la famille du puissant général d’Oufkir.
 La projection des films est quotidienne, des gros magasins où les « clients » s’approvisionnaient. La marchandise venait directement des USA à la base militaire. Aucun contrôle marocain. Le mercredi était réservé aux princesses, Fatima Oufkir et autres femmes de grands bonnets.
   La mère ne s’évanouit pas. Pour se désaltérer, elle prit un coca, son rejeton une bière.
Avec son père, le jeune choisissait des endroits plus « marocains ».
Le père et la mère se retrouvèrent à Kénitra pendant le ramadan. Le jeune et les deux collégiens ne changèrent en rien leurs habitudes. La cuisine était bien approvisionnée. Le couple préparait simplement ses repas de ramadan.  Les parents, en bons pratiquants, n’ont jamais fait de remarques sur les comportements « hérétiques » de leurs enfants. Chacun faisait ce dont il était convaincu.

 6-   La mère venait de temps en temps passer quelques semaines à Kénitra. C’étaient les jours de fêtes. Les recettes des mamans sont toujours merveilleuses, appétissantes.. Elle adorait cuisinait à base de poisson…
Pour que sa mère supportât mieux sa nouvelle « vie   de citadine », le jeune acheta à crédit un téléviseur. Le premier jour, la mère s’installa devant l’appareil. L’appareil causait arabe, puis français. Elle n’avait rien compris. Elle dit à haute voix : est-ce qu’il ne parle pas tamazight ? Son rejeton répondit : non ! Depuis ce jour-là, elle préférait bouder l’appareil et cela jusqu’à son décès il y a une douzaine d’années.


7-Le 17 juin 1972 vers 16 heures de l’après-midi, arrivé devant la direction de la « sureté nationale » à Rabat, en tant qu’ancien résistant contre le colonialisme, le père demanda à son fils : est-ce que vous avez des armes ? Ce dernier répondit : non. Le père, les larmes aux yeux, dit alors : ne donne aucun nom. Le père connaissait Amine, Zouhair et Hajji, membres de la direction locale de l’organisation (Kénitra). 
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